La polyvalence professionnelle

La polyvalence professionnelle

1- Problématique

La polyvalence professionnelle est un terme ambigu qui prend naissance dès le plus jeune âge. Chaque élève prépare un diplôme devant le conduire à terme à l'obtention d'une qualification professionnelle débouchant sur un métier. De ce fait, la polyvalence, par son caractère à multi critères avec des frontières professionnelles difficilement définissables apparaît comme une contradiction majeure !

Le principal objectif d’une entreprise est d’accroître sa productivité et de générer des bénéfices. Pour y parvenir, elle doit avoir des ressources humaines qualifiées. Ainsi, les dirigeants se demandent s’il faut miser sur la polyvalence des employés ou leur spécialisation ?

Le terme de polyvalence reste toujours ambigu. Dans les esprits, Le polyvalent, tout comme le généraliste, sait un peu de tout, mais rien à fond. Il est capable d’intervenir dans différents domaines, de réaliser des choses variées et de maîtriser des connaissances hétérogènes, mais à un niveau relativement sommaire. A l’inverse, le spécialiste, tout comme l’expert, sait beaucoup de choses, mais dans un domaine spécifique bien précis. 

Toujours est-il que la polyvalence professionnelle s’accélère aujourd’hui. C’est une notion de gestion des ressources humaines qui représente la recherche d'une optimisation des compétences transversales du travailleur au sein de l'entreprise.

La polyvalence se voit dans deux dimensions :

  • Dimension horizontale : c’est la maîtrise des techniques d'un métier vers d'autres métiers,
  • Dimension verticale : c’est l'intégration d'une fonction vers d'autres fonctions à d'autres niveaux.

Et le rôle du management est crucial dans cette approche de l’organisation du travail.

Il y a des dizaines d'années, les employeurs recherchaient principalement des candidats de  « type I » : des personnes possédant une expertise approfondie dans un domaine spécifique, par exemple un comptable ou un avocat. Ce concept a évolué au fil des ans. Dans les années 1980, McKinsey a développé l'idée du professionnel de « type T ». La barre verticale du T représente une connaissance approfondie d'une discipline particulière. La barre horizontale correspond à l'aptitude à collaborer avec d'autres disciplines et à acquérir de nouvelles compétences ou connaissances.

 

2- Définition de la spécialisation

L’employé est un expert dans un domaine bien précis et donc il est très efficace dans ce domaine. II est en mesure de mettre son savoir-faire à disposition afin d’atteindre les objectifs. Pour le développement de l’organisation, un employé spécialisé est plus crédible qu’un travailleur polyvalent car il a reçu une formation spécifique. Il est souvent un référent. Il se maintient à niveau et donc il est garant de la qualité.

Les secteurs adaptés à la spécialisation sont ceux où l’activité à réaliser est complexe, à forte valeur ajoutée et potentiellement risquée. C’est-à-dire une activité pour laquelle le temps de formation des collaborateurs est long et se mesure en mois voire en années. Ainsi, souvent, les professionnels détenteurs d’un métier bien précis refoulent le principe de polyvalence. Ils valorisent au contraire le principe de spécialité exigeante, longue à acquérir, difficilement imitable. 

La spécialisation se rencontre davantage dans les grandes entreprises où la surface d’activité est suffisante pour pouvoir recruter et faire travailler dans leur domaine de compétences respectif les différents spécialistes dont elle a besoin. 

Expert

 

En effet, la polyvalence a des inconvénients. Elle peut conduire à une déqualification des salariés, à une dégradation des services menant parfois à des risques graves, par exemple dans le domaine des transports, de la médecine, du nucléaire, etc. Le salarié polyvalent à l’impression de rester à la surface des choses, de ne pas avoir le temps de maîtriser à fond chacune des situations de travail, ni de développer des routines efficaces.

Enfin, les enquêtes statistiques menées par l’INSEE et la DARES indiquent que ce sont les personnes les moins qualifiées qui se déclarent les plus polyvalentes. Elles expriment le sentiment d’une fragilité professionnelle car elles sont les plus facilement remplaçables, notamment par des intérimaires.

 

3- Définition de la polyvalence

La polyvalence consiste en une diversité dans les affectations, une confrontation à différents environnements professionnels et une mobilisation de connaissances hétérogènes. Une confusion fréquente est d’assimiler la polyvalence à la variété des tâches déployées. Un ébéniste, par exemple, est capable de choisir les essences de bois d’assurer les découpes, d’assembler les morceaux, de poncer l’ensemble, de vernir le meuble, etc. Mais cette variété de tâches et de techniques ne relève pas de la polyvalence. On pourrait parler de polyvalence si l’ébéniste en question était simultanément menuisier et charpentier.

La polyvalence est une réponse aux ruptures dans la chaîne de production.

Variation brutale des commandes ? Vos salariés maîtrisent plusieurs tâches et assurent la productivité et la qualité sur de multiples opérations et process. L’entreprise devient flexible, on dit « agile ». Salariés absents ? Ils peuvent rapidement être remplacés par leurs collègues.

Pour l’employeur, la polyvalence est synonyme de flexibilité, de souplesse d’affectation, de productivité. Personne n’attend du travail puisque chacun est capable de s’adapter. Ainsi, la polyvalence permet d’accroître les performances sans pour autant rehausser la masse salariale. Les frais liés au recrutement sont réduits.

Notons cependant que les secteurs adaptés à la polyvalence sont des structures de taille moyenne où l’on réalise une activité globalement simple. C’est-à-dire une activité pour laquelle le temps de formation des collaborateurs est court, et se mesure en heures ou en jours. Comme dans la restauration rapide ou la grande distribution. 

D’autre part, la capacité d’un employé à réaliser de multiples activités au sein d’une organisation lui permet de s’éloigner de la routine du quotidien. Cela limite le taux d’absentéisme et les risques de burn out. En général, la polyvalence favorise le bien-être des salariés. Être polyvalent, c’est avoir une vision globale du produit, un atout pour être solidaire. Aussi être polyvalent peut aider à avoir une vision plus claire de ce que font les autres équipes. Ce qui facilite la collaboration et évite les malentendus. La polyvalence permet également d'avoir un œil nouveau sur chaque sujet ce qui permet de remettre en question ses pratique et d'évoluer.

Polyvalence

 

Afin que la polyvalence puisse être synonyme de sécurité de l’emploi, la Loi Avenir professionnel impose à chaque entreprise de plus de 50 salariés d’effectuer tous les 6 ans un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel de chaque salarié et vérifie que chacun :

- a suivi une formation,

- a acquis un élément de certification professionnelle, soit par diplôme (ou titre professionnel), soit par VAE (Validation des Acquis de l’Expérience),

- a bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle.

Enfin on peut citer le car particulier des cadres qui, dans le contexte économique actuel, se doivent de posséder à la fois des compétences métiers, des compétences transverses et aussi des savoir-être. Ils sont à la fois experts et polyvalents.

 

4- Mise en place de la polyvalence

Tout d’abord la polyvalence s’anticipe. Ce n’est pas une gestion « d’exception » ou « de crise ». Il faut lister les situations inhabituelles qui peuvent se produire et prévoir la meilleure solution possible. Des simulations sur le terrain sont préconisées. Dans cette recherche, il ne s’agit pas de faire appel à des individus aptes à remplir toutes les fonctions, "sachant tout faire", disponibles à tout moment. La réponse se trouve plutôt dans la recherche de salariés disposant des moyens intellectuels ou physiques les mieux adaptés aux circonstances du moment ou à la situation rencontrée.

Cela n’est pas simple car la polyvalence peut être perçue comme une contrainte en raison des efforts d’adaptation nécessaires. Le salarié peut être frustré de ne pas avoir le temps de maîtriser en profondeur les compétences requises sur chacune des situations de travail. Toute connaissance qui n’est pas régulièrement investie dans une pratique disparaît. De plus, si l’on se place de l’autre côté du miroir, il existe souvent une crainte sous-jacente selon laquelle si quelqu'un d'autre est capable de faire votre travail, vous risquez de perdre votre emploi.

Comment déceler des compétences cachées ? Un DRH doit faire preuve de curiosité envers l’employé, en lui demandant quels sont ses loisirs, ce qu’il aime bien faire en dehors du travail, d’où il vient, etc. 

Il peut alors découvrir un talent rare dans l’entreprise ! On constate souvent que les polyvalents qui réussissent le mieux ont l'esprit d'entreprise.

Polyvalence

 

Qu’en est-il enfin de la rémunération : un employé polyvalent doit-il être mieux payé qu’un employé spécialisé ?

Du point de vue de la politique salariale, la majorité des professionnels valorisent davantage l’expertise, l’expérience, la capacité à réaliser des activités complexes et exigeantes. Car il faut du temps pour exceller que ce soit dans le sport, les arts, la science ou les différentes fonctions de l’entreprise. 

Comparez le salaire d’un professeur des écoles, typiquement polyvalent, à celui d’un professeur d’université spécialisé en droit des affaires. Comparez le salaire d’une aide-soignante polyvalente à celui d’une infirmière spécialisée en bloc opératoire. Les entreprises instaurent de plus en plus des primes pour inciter les collaborateurs à une forme de mobilité.

 

5- Conclusion

La polyvalence s’est transformée en un élargissement, un enrichissement des tâches et change avantageusement la classique qualification de "bouche trous". Même si on peut le regretter, il est faux de croire que l’on peut être bons partout, exceller dans tous les domaines en même temps. Un multi spécialiste n’existe pas. Un expert polyvalent n’a aucun sens.

Dans une entreprise, vous l’aurez compris, les deux profils : polyvalent et expert sont nécessaires et complémentaires. La tendance est à avoir des profils polyvalents qui s'appuient sur de l'expertise. Mais peut-être, au moment où l’on parle, cela est-il déjà en train de changer avec l’arrivée de l’externalisation de masse,  l’intelligence artificielle qui proposent de nouveaux profils sur le marché de l’emploi !

 

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