En quoi notre société de consommation favorise l’envie de collectionner ? Que recherche le collectionneur ?
Les entreprises sont-elles dépassées par le phénomène ou à son initiative ? Quelles sont les nouvelles stratégies dans ce domaine.
Je vous raconte tout.
La tendance accumulatrice de la société de consommation
La confrontation des individus avec un nombre de plus en plus important de biens manufacturés constitue une invitation à la collection qui amène les entreprises à développer des produits formatés pour satisfaire cette tendance accumulatrice des collectionneurs.
Le collectionneur doit, en effet, percevoir qu’il a, à travers les biens marchands qu’on lui propose, une possibilité de construire petit à petit une série. Le fabricant nourrit alors le besoin d’accumulation du consommateur.
Au-delà de l’entassement ou de l’abondance, les objets s’organisent naturellement en panoplie ou en collection. Presque tous les magasins d’habillement, d’électroménager etc offrent une gamme d’objets différenciés qui s’entrecroisent et finalement se déclinent les uns des autres.
Le manque affectif et le caractère social de la collection
Il est reconnu que le collectionneur cherche à combler un certain manque affectif.
La collection le remet au centre du réseau social par différents moyens.
Tout d’abord, de ce jeu de séduction qu’est la quête de la collection, émerge une gratitude envers le commerçant lui-même et une reconnaissance mutuelle du savoir-faire de l’autre.
Les passionnés se rencontrent dans des réseaux, des associations.
Un collectionneur d’un ouvrage particulier déclare qu’il achète les livres de cette série, non pas pour les lire mais pour les avoir tous !
Encore un autre exemple : apparus dans les années 60, les verres à moutarde commercialisés par la marque Amora ont séduit peu à peu les collectionneurs. Ces verres dont la décoration met en scène des personnages recrutés dans la bande dessinée, sont renouvelés aujourd’hui à un rythme soutenu. Pour aider les collectionneurs à compléter leur série, l’entreprise a créé un forum d’échanges sur son site internet.
On remarque aussi la prolifération des magazines destinés aux collectionneurs qui alimentent leur soif d’apprendre sur leur thème de prédilection. Exemple : Delcampe Magazine.
Les entreprises dépassées par le phénomène de collection
Souvent les entreprises sont confrontées à une passion envers leur marque qu’elles n’avaient absolument pas anticipée. Soit l’exemple de la firme Solido dont les premières petites voitures furent créées en 1932. La variété et l’originalité des modèles conçus pendant plusieurs décennies en ont fait des pièces de collection qui sont aujourd’hui particulièrement recherchées par les passionnés. La marque de jouets est devenue ainsi au fil du temps une marque emblématique pour les collectionneurs. Pour tenir compte de leurs attentes, Solido commercialise aujourd’hui des miniatures haut de gamme.
L’industriel du jouet Hasbro avait tenté de lancer un modèle féminin dans le monde très fermé des figurines GI Joe. Cette poupée mannequin qui faisait office d’infirmière n’a pas rencontré l’assentiment du public concerné lors de son lancement si bien que sa fabrication a été très rapidement stoppée. On constate qu’aujourd’hui, ce jouet est une pièce rare qui est très activement recherchée par les connaisseurs.
Les produits manufacturés sont ainsi laissés à l’appréciation du collectionneur qui sait percevoir le détail esthétique qui fait d’un produit banal une pièce convoitée par quelques initiés. Un collectionneur de cartes téléphoniques a déterminé des critères méconnus du grand public comme le nombre de tirages indiqués au dos, le diamètre de la puce ou encore les variations graphiques du circuit imprimé pour hiérarchiser les pièces de sa série.
Les entreprises spécialisées dans les collections
Nous connaissons tous la marque Ferrero qui commercialise les surprises Kinder et qui change les gadgets insérés dans les œufs en chocolat chaque année à la même période : temps fort pour les collectionneurs !
L’enjeu qui s’impose aux fabricants consiste à transformer une valeur marchande en valeur affective, porteuse de significations sociales ou symboliques pour le passionné.
Pour répondre aux attentes des collectionneurs, certaines enseignes se sont spécialisées dans la commercialisation des pièces à collectionner. Les séries limitées, les tirages spéciaux édités pour commémorer un événement sont d’autant d’appels à la collection émanant des fabricants.
De nombreuses firmes américaines produisent en masse et vendent directement ou sous licence de grandes marques, ces nouveaux objets prêt-à-collectionner sous forme de figurines, d’objets de décorations, de peluches… C’est le marché des "collectibles".
En France, les Éditions Atlas s’inscrivent comme le leader sur le marché des collections qui compte aujourd’hui d’autres entreprises proposant des concepts similaires telles que Hachette Collections, les Éditions Fabri, Del Prado ou encore Altaya.
Le collectionneur devient lui-même créateur de valeur au sens « Produit Intérieur Brut ».
Au travers de la collection, on s’achemine vers un processus de co-construction de l’offre car le passionné devient en quelque sorte un producteur de sens puisqu’il fait bénéficier le produit d’une "autre vie" voire d’une "seconde existence" dans le cas d’une récupération. La consommation du produit dans le contexte de la collection n’est plus un acte de destruction mais un processus de création de valeur.
Le phénomène actuel : la collection capsule
Dans l’univers de la mode, une collection capsule désigne une ligne de vêtements généralement composée de seulement quelques pièces en édition limitée. Ces créations sont souvent le fruit d’une collaboration entre deux marques, d’une griffe avec un créateur ou un grand nom de la mode. Aujourd’hui, les influenceurs et célébrités de tous horizons sont de plus en plus demandés pour réaliser ces collections. Les pièces, commercialisées généralement en petites quantités, peuvent créer des émeutes en magasin le jour de leur sortie, victimes de leur succès retentissant. Le concept de la collection capsule a démarré à grande échelle en 2004 avec la collaboration entre Karl Lagerfeld et H&M.
Le marketing de collection évolue selon 4 scenarii
1- Le collectionneur construit sa série marginale de façon autonome en s’appropriant les produits conçus par l’entreprise sans que celle-ci puisse l’accompagner dans sa démarche car elle n’a pas anticipé le phénomène.
2- Le produit n’est pas envisagé comme un objet de collection lors de son lancement. En revanche, il devient un support de collection reconnu au cours de son cycle de vie. Les entreprises sont en quelque sorte rattrapées par la demande des collectionneurs qui constituent une cible plus impliquée que celle des utilisateurs et influencent leur stratégie marketing dans sa globalité.
3- Le produit est développé dans une logique de série. L’achat du produit n’implique pas nécessairement une entrée dans le processus mais permet de faire apparaître un sentiment de frustration chez le consommateur qui a perçu l’incitation à la collection.
4- Le produit est positionné sur le marché comme un objet de collection. Il répond à une attente des collectionneurs préalablement identifiée par le praticien qui a fait de la collection sa mission principale sur le marché. Pour favoriser l’engagement du collectionneur dans ce processus reposant souvent sur du long terme, les premiers objets de la série sont proposés à un prix modique.
Le marketing de collection a 4 facettes
1ère facette « des étapes à franchir » :
Cela consiste à concevoir la collection comme une série d’étapes à atteindre au travers de l’achat des éléments.
Les concepteurs pimentent également la quête des objets en créant parfois des situations de pénurie sur certaines pièces de la collection, A titre d’illustration dans les séries Magic, Pokémon, il y a une chance sur cent de posséder une carte rare.
2nde facette « l’artefact » :
Les produits sont ainsi soumis à une évaluation esthétique des connaisseurs qui sont amenés à constater la facture soignée des pièces à collectionner.
Les messages véhiculés par les Éditions Atlas ou Hachette Collections témoignent de l’ancrage affectif dans lesquels ces entreprises entendent placer les collectionneurs en insistant sur leur expertise acquise ou à acquérir à l’occasion de cette expérience.
Les messages des praticiens commercialisant des artefacts sont, à cet égard, enrobés d’une connotation pédagogique.
3ème facette « l’extension » :
Les produits dérivés permettent, en effet, aux passionnés de mener des collections transversales à partir d’une thématique fédératrice : les produits Star Wars, par exemple reposent sur cette logique implicite de la collection.
4ème facette : les cadeaux
Les cadeaux se fondent sur des techniques promotionnelles qui sont utilisées comme des outils de séduction vis-à-vis du consommateur. La collection devient ici en quelque sorte une gratification récompensant l’achat d’un produit.
Attention aux échecs
Si les exemples de lancement foisonnent, on peut noter de multiples échecs montrant qu’il ne suffit pas de se décréter "marchands de collections" encore faut-il bien comprendre les ressorts psychologiques et sociaux du phénomène pour développer des compétences spécifiques contribuant au succès d’un concept de collection.
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